Bonjour,

pour la première fois en 15 ans d'activité je me vois confrontée à cette situation : un client refusant de me régler la facture de solde alors qu'il utilise depuis plusieurs mois les création faites pour lui (logo, documents chartés par nos soins et design du site Internet). Normalement je cède mes droits mais je spécifie dans mes CGV que ces droits ne sont acquis qu'une fois la prestation entièrement réglée.

Je suis en train de rédiger un courrier de relance et souhaite lui faire un peu peur pour le faire réagir. D'après vous, quel montant je pourrais indiquer comme valeur pour l'utilisation de ces créations non-autorisées ? Y-a-t-il un barème, des jurisprudences sur lesquels m'appuyer ? Merci d'avance

droits d auteur
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7 réponses

il y a 5 ans par ChristopheFantoni

Bonjour,

Tout d'abord, remettons les choses à leur place.

En France, le droit d'auteur est inaliénable. Vous ne pouvez donc pas le vendre. Et même si vous le vendez quand même, la vente — devant n'importe quel tribunal — sera réputée comme illégale. Au final, non seulement votre client sera en faute... mais vous également. En fait, la seule chose que vous pouvez réellement vendre, c'est le droit d'exploitation de votre travail graphique. Et cela se cède par contrat, pour une période clairement déterminée. Mais au final, l’auteur, quoi que vous fassiez (ou disiez), c‘est toujours vous.

Ensuite, quand on souhaite vivre de sa propriété intellectuelle, il faut se prémunir un minimum au niveau légal. Cela veut dire que pour n'importe quelle œuvre, il faut être capable de justifier d’une date d'antériorité juridique. Et celle-ci s’obtient en déposant son travail chez un notaire, un huissier, etc. Aujourd’hui, on peut aussi faire ce type de dépôt en ligne (ex : Copyright France, le service E-dpo de la SACD, etc) pour un peu moins de 10 euros. Attention toutefois, ce type de dépôt n’est valable que pour les pays dépendant du droit d‘auteur. Pour les pays du common law (essentiellement les pays anglophones), c’est le copyright qui s’applique. Et pour cela, il vous faut aller revendiquer votre copyright au Copyright Office de la librairie du Congrès américain (pour $30 environ). Cette revendication est même obligatoire en cas de procès.

Pour finir, il faut également vous inscrire à une société de gestion de droits d’auteur. Ce n’est pas obligatoire, mais c’est fortement recommandé pour les professionnels. Pour les auteurs graphiques, c’est la SCAM qui s’occupe de tout ça. En pratique, il vous faudra juste aller y déclarer vos œuvres et dès qu’elles seront exploitées commercialement, vous toucherez un peu d’argent, même si aucun contrat ne vous lie à la société exploitante (ex. : un magazine qui publie dans ses pages un reportage sur une société dont vous avez dessiné le logo).    

Pour l'instant, je vais m'arrêter là, étant donné que je connais cette problématique par cœur (pour y faire face quasi quotidiennement depuis un peu plus de 25 ans).

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il y a 5 ans par olivierChaillot

Pas mieux ... Pour le courrier faites vous assister pour la rédaction ! En cas de procédure ce sera mieux. Pour connaître les avocats spécialiste de la PI adressez-vous à l'INPI ils ont des listes... 

Bon courage 

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il y a 5 ans par ChristopheFantoni

Maintenant, pour faire « peur » à votre client indélicat, la seule solution consiste à lui envoyer une copie de votre certificat de dépôt accompagnée d’une copie de ce qui a été déposé. L’envoi doit se faire dans une enveloppe neutre en lettre simple, puis en lettre recommandée (quelques jours plus tard). À ce sujet, je peux qu’acquiescer au conseil qu’@olivierChaillot vous a donné de vous faire assister d’un conseil/avocat spécialisé en propriété intellectuelle. Votre courrier aura alors beaucoup plus d’impact que si vous l’aviez vous-même envoyé (surtout si votre client est une grosse société).

Par contre, sachez que votre client peut tout à fait vous faire des misères si sous êtes dans l’incapacité de revendiquer la paternité de votre œuvre en lui communiquant votre date d’antériorité juridique. Et dans ce cas, vous pouvez être certain que n’importe quel tribunal plaidera en sa faveur (surtout s’il avait planifié de vous déposséder de votre travail en déposant votre travail graphique en son nom). Dans ce cas, il vous faudra sans doute requalifier votre demande pour obtenir gain de cause (ex. : rupture du contrat, non-respect de certaines clauses, etc.). Et ça, ce n'est pas forcement l'apanage d'un avocat spécialisé en propriété intellectuelle, mais plutôt d'un avocat en droit du travail.

Dernier point : les tribunaux nationaux et internationaux ont tendance à croire sur parole les auteurs déposant leur travail dans les organismes « officiels » gérant les droits d’auteur (ex : SACD pour les auteurs dramatiques, SGDL pour les auteurs littéraires, SCAM pour les auteurs graphiques, etc.). À leurs yeux, cela prouve de facto votre sérieux. Votre professionnalisme. C’est d’ailleurs encore plus vrai pour les pays du common law (ex. : dépôt au Copyright Office de la librairie du Congrès américain). En clair, si vous passez par d’autres organismes que ceux-là, des organismes, disons, plus « économiques », ce sera toujours bien plus compliqué – bien que parfaitement faisable – d’obtenir gain de cause.

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il y a 5 ans par ChristopheFantoni

Il y a un point que je n’ai pas abordé, c’est le moment où vous devez intervenir. En effet, votre client sait pertinemment que ce qui peut le perdre, c’est l’exploitation commerciale de votre travail (ex. : la présence de votre logo sur le paquet d’un produit commercialisé).

En fait, si vous réclamez votre dû  beaucoup trop tôt, c'est-à-dire avant la sortie du produit dans le commerce, le client peut parfaitement décider de ne pas utiliser votre travail graphique pour éviter les sanctions judiciaires. Votre affaire en matière de propriété intellectuelle s’arrêtera là. Vous devez alors attaquer votre client sur l’aspect « droit du travail » puisque le contrat n’a pas été respecté.

Maintenant, si vous réclamez votre dû un peu trop tard – volontairement ou non – et que le produit affichant votre logo se retrouve dans le commerce, non seulement vous pourrez attaquer votre client en matière de propriété intellectuelle, mais vous aurez alors une preuve indiscutable de votre spoliation. Par contre, je ne vous cache pas que cette dernière approche nécessite que vous ayez réellement une preuve d’antériorité juridique.  

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il y a 5 ans par olivierChaillot

Attention, il est question de droit du commerce... C'est une facture impayée donc le transfert de propriété n'est pas effectif... 

C'est pour cette raison que tu peux agiter le droit de propriété intellectuelle ... Utilisation frauduleuse d'un graphisme régi par ce droit. ... Vérifie auprès d'une (ou un) femme de l'art . 

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il y a 5 ans par ChristopheFantoni

Dans ces conditions, si on part du principe qu'il s'agit d'une simple facture partiellement impayée, une lettre émanant d'un huissier (ou d'un avocat) devrait amplement faire l'affaire. Attention, toutefois à bien suivre le protocole commercial habituel avant de passer par un huissier/avocat, car cela pourrait se retourner contre vous en cas de procès (ex. : lettre de relance à l'amiable, mise en demeure, etc.).

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il y a 5 ans par EtienneZulauf

Bonjour,

Tout ce qui a été dit devrait t'aider. Pour faire court, un simple e-mail d'un-e avocat-e permet très souvent de remettre tout en place sans trop perdre de temps. Si tu as un-e ami-e avocat-e même dans un autre domaine, demande-lui de faire un simple e-mail, et sans tarder. Toute procédure au tribunal ne peut commencer qu'après réception d'un recommandé et du délai indiqué dépassé, donc avec les mauvais payeurs rien ne sert d'attendre et d'espérer : faut passer direct à l'offensive. Un recommandé de relance est vite écrit et coûte moins de 10 €...Allez, on ne se laisse pas faire !

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il y a 5 ans par CelineRobert

Bonjour,

Des nouvelles de cette affaire. Suite à mon courrier, le client a bougé et m'a annoncé vouloir régler la note. A ce jour, rien encore sur mon compte ...

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il y a 5 ans par olivierChaillot

le bout du tunnel se rapproche :)

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il y a 5 ans par CelineRobert

@olivierChaillot il s'agit bien de cela : une facture impayée. J'ai peut-être mal présenté le problème en parlant des droits d'auteur. Mon idée était de voir si je pouvais valoriser cette utilisation non autorisée par un montant dans la lettre pour les inciter à se bouger un peu.

@ChristopheFantoni : il s'agit d'une lettre de relance après 2 mails sans réponse et une discussion téléphonique pleine de mauvaise foi. Pour moi ce serait la dernière étape "amiable" avant de passer par un avocat

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il y a 5 ans par olivierChaillot

il me semble que les éléments (commerce et PI) sont liés. au delà des relances classiques pour facture non payée, un courrier sommant le client d'arrêter d'utiliser les graphismes au nom du non transfert des droits (Cf. CGV acceptées par lui) du fait de la facture impayée et lui intimant la restitution de l"ensemble des oeuvres ... devrait avoir son petit effet ... tout en le menaçant de poursuite pour vol d'oeuvre couvertes par les droits d'auteurs et la PI ou de contrefaçon ... voit avec un conseil en PI ou un avocat spécialisé pour la forme ...

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il y a 5 ans par ChristopheFantoni

Alors, la discussion téléphonique, on peut de suite l'oublier : ça ne laisse pas de traces. Sa valeur juridique est donc nulle.

Quant aux e-mails, c'est un peu la même chose. Il y a bien une trace, certes, mais celle-ci n'a absolument pas la même valeur juridique que le courrier papier.

En clair, si vous voulez faire les choses en consolidant l'aspect légal de votre démarche, je vous invite à envoyer une dernière relance amiable en lettre simple, puis quelques jours plus tard la même relance, mais en lettre recommandée. Dans ce courrier, spécifiez clairement la durée que vous laissez à votre client pour qu'il s'acquitte de sa dette (souvent de 1 semaine à 10 jours).

Ensuite, prenez un huissier (plutôt qu'un avocat) qui s’occupera de recouvrer votre dette.

En attendant, je vous invite à relire le contrat que vous avez fait signer à votre client afin d’être certain que celui-ci est bien conforme à la réglementation en vigueur (propriété intellectuelle, droit du travail, droit commercial, etc.).  

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il y a 5 ans par olivierChaillot

je t'envoie en MP les coordonnée d'une CPI à coté de chez toi qui maitrise bien le sujet

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il y a 5 ans par CelineRobert

Merci beaucoup !

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il y a 5 ans par CelineRobert

Merci à tous pour vos réponses. Un courrier est parti aujourd'hui.

A suivre ...

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il y a 5 ans par CelineRobert

Bonjour,

des nouvelles encore : ça y est, ils ont payé !!!

Merci encore à tous et merci à Skiller

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