Je te remercie Olivier de l'excellence de cette question qui nous rappelle que les journalistes peuvent philosopher avant de devenir des communicants..
La fonction théorique du journalisme est de donner une information qui permettent au lecteur de se forger lui meme une opinion. En ce sens le journalisme est un moyen de la démocratie et d'émancipation des masses.
Acceptation à rattacher à l'essor de la presse, au 19eme siècle, où l'information était plus rare qu'aujourd'hui.
Notre tradition française de la presse est par ailleurs marquée par la notion d'engagement . C'est Zola et "J'accuse". L'engagement du journalisme est dans l'an de la presse française.
Et ici , nous sommes déjà dans la problématique de la "manipulation de l'information " pour le "bien" présumé du peuple..
Dans l'absolu un journaliste ne peut pas être neutre, ni objectif, puisqu'il est humain, et appartient à un media qui constitue lui meme une entité avec une identité marquée.
J'emprunte à Florence Aubenas cette nuance : un bon journaliste c'est celui qui sera conscient de sa subjectivité ,qui sera capable de l'utiliser au mieux, pour la sublimer, la dépasser et construire un article qui permettra au public de s'intéresser au réel qui l'entoure, de l'interroger et de se forger lui meme une opinion.
Nous rentrons ici dans le vrai coeur du sujet : la responsabilité individuelle.
Ce qui est intéressant dans le journalisme (tirs ici vu en France), c'est qu'il repose sur de l'éthique personnelle, et pas sur le droit défini par nos lois, notre collectif.
J'invite chacun à consulter les chartes de journalistes, des médias ou d ella profession. L'Afp vient par exemple de refondre la sienne, et ce n'est pas par hasard ..
www.afp.com/fr/lagence/charte-de-lagence-franc...
La déontologie s'enseigne en école de journalisme, fort heureusement. Et j'irai au delà, il n'y a aucun cours où cette question de la responsabilité du journalisme vis à vis de l'honnêteté de l'information , n'est pas abordée.
Pourquoi parce qe cette question n'a jamais été si pertinente . Entre la perte d'indépendance financière des rédactions, les conflits d'interets qui écrasent certains des rares et dominants patrons de la presse hexagonale, (Bolloré) , l'hyperconcurrence et l'accélération effrénées de l'information (due en grosse partie à la révolution numérique) , la consécutive baisse de qualité (plus de vérification, et plus de com) et perte de crédibilité du métier ..
J'aoute lesrseaux sociaux, le web et la possibilité de créer son media de nulle part sans contrôle. Nous observons proposerez les hérauts du complotisme ..
J'ajoute l'explosion des contenus marketing , qui avec des moyens considérables, deviennent des contenus "ressemblant " à ceux de la presse et qui font tout pour être assimilés à des contenus journalistiques ..
Tout cela nous amène à aujourd'hui : une confusion généralisée entre la communication et le journalisme.
L'objectif de ces deux pratiques est fondamentalement different : la communication ne vise pas à apporter une lecture globale du monde dans lequelnous vivons, ni à faire des lecteurs des citoyens.
La presse ne le fait que peu. Peut être mais c'est sa mission, et les médias qui sauront se ressaisir de cette mission , répondent à une vrai besoin aujourd'hui.
La communication et le journalisme se sont par contre rapprochés sur les outils : ils partagent, s'échangent des moyens, je dirai pour faire court , "réthorique" de convaincre , séduire, manipuler , pour ce que tous les deux affirment être le bien de leur cible.
Le bien est ce d'acheter une paire d'escarpins de luxe ou est ce de s'informer sur les nouvelles perspectives d'emploi dans le nucléaire du bassin de Cherbourg .. cela est bien évidemment relatif.
Je conclurai sur ma marotte de la responsabilité : un journaliste est responsable s'il écrit en ne respectant pas la charte de déontologie qui caractérise et fait le prestige du métier qu'il a choisit. Un communiquant s'engage pour la marque qui le rémunére (fusse t-elle un homme ou une femme politique:) .
Un acheteur s'engage dans une acte de consommation et ses conséquence.
Un lecteur de presse gratuite s'engage à disposer d'un contenu journalistique payé par une marque.
Un lecteur d'une presse payante s'engage pour disposer d'un contenu aujourd'hui plus indépendant.
( Il faudrait aussi parler évidemment de la différence entre les faits et les opinions. Qui renvoie aussi au coût de l'information ..)
Voilà pour le coté information et journalisme
Intéressant aussi d'explorer celui de l'action.
Pour revenir à ta question Olivier, j'y ai travaillé precisemment au moment de la Cop 21. Une partie de journalistes spécialisés en écologie défendent cette idée qu'à partir du moment ou on est très bien informé sur les questions environnementales, on devient forcement un écolo convaincu. Cela implique t'il qu'on impose notre conviction à nos lecteurs ? C'est le débat qui a entouré le départ d'Hervé kempf du monde..
Ou cela implique t'il qu'on change de métier et qu'on devienne par exemple politique , ou militant actif , ou entrepreneur ?
Existe t-il un métier, des pratiques où la manipulation est une bonne action ? :)